LE BETON ET LA STANDARDISATION : UNE CROISSANCE EXPONENTIELLE POUR UN AVENIR MERDIQUE
La France, « cet encore beau pays », ne le restera plus bien longtemps si on continue à donner la priorité à l’accumulation de signes monétaires et au PIB, mesure de la croissance économique devenue obsolète mais qui continue à prévaloir dans une société mondialisée qui s’enfonce dans le néant au fil des années. Aurait-on oublié que sans les éléments qui constituent la biodiversité, nous ne sommes plus rien ?
Tous les sept ans, l’équivalent d’un département est bétonné en France, les sols imperméabilisés et donc tués avec tous les organismes vivant qui les composent. En 2006, nous en étions à 5% du territoire, on dépasse les 9% aujourd’hui : dites merci au comportement moutonnier des consommateurs, puisque les centres commerciaux, que j’appelle « les espaces de consommation standardisés », ont augmenté leur surface globale de vente de 44% entre 1992 et 2004 alors que la consommation n’a cru que de 14% sur la même période. Pendant ce temps, les petits commerces, ceux qui sont encore tenus par des professionnels dans leur métier, crèvent les uns après les autres, laissant une commune sur deux sans un seul magasin de proximité. C’est le début de la fin : plus de commerce, plus de service public, « pas un troquet, pas une mobylette, rien » (Coluche) et les petits villages si doux à vivre il y a encore quelques années deviennent déserts, abandonnés par l’Etat et par les habitants dépités. Puis un jour, un projet en faveur de la standardisation se pointe et finit le travail de sape réalisé par le couple multinationales-politiques, gouverné par l’argent facile au détriment de la qualité de la vie du plus grand nombre. Ces gens qui fuient la misère des campagnes rappliquent en ville grossir le nombre des chômeurs ou des travailleurs pauvres à la solde d’un grand groupe international la plupart du temps : cariste dans l’entrepôt Carrefour de produits importés de Chine et de Taïwan, caissière chez Franprix, boucher chez Champion, vendeur chez Ikea ou chez Bricomarché, que des boulots très intéressants bien payés, et dans lesquels on peut s’épanouir, pas vrai ?
Qui pense à faire des projections dans l’avenir ? Ce modèle mortifère qui nous coule peu à peu dans le béton et dans la standardisation par le bas aboutira-t-il au bonheur absolu que nous vantent la publicité et la minorité dirigeante ? Bien-sûr que non ! Même un enfant de 9 ans trouverait la réponse, en supposant qu’il ne soit pas déjà lobotomisé par les écrans et la publicité (ah, la fameuse « pub » qu’on doit interdire aux enfants si on estime être un parent responsable, les images viennent se graver dans leurs jeunes cerveaux pour la vie, ne l’oubliez jamais !).
Tiens, on va faire un petit exercice de CM1 : 6,5 ans pour bétonner 4% de la superficie du pays et nous en sommes à 9% aujourd’hui. En supposant que le rythme de travail des enflures du béton reste constant (alors qu’il augmente dans la réalité), dans combien d’années la France sera-t-elle l’équivalent d’un parking géant d’une grande surface ?
Il reste 100-9 = 91% de béton et d’asphalte à poser à la vitesse de 4% tous les 6.5 ans, il faudra donc (91/4) 22.75 périodes de 6.5 ans pour qu’il n’y ait plus un arbre en France, soit 148 ans. En théorie, il nous reste donc environ un siècle pour virer l’essentiel de la biodiversité et nous mettre dans la merde complète (plus de terres agricoles, changement du climat vers la sécheresse, qualité de l’air sous le zéro absolu, etc …) : au vu de la réactivité des politiques (Hollande raconte n’importe quoi avec ses objectifs utopiques de réduction de consommation de l’énergie fossile à 12 et 30 ans, mais bon, cela fait partie des artifices pour endormir le bon peuple), je pense vraiment que notre espèce est en danger si elle conserve ce mode de « développement ».
C’est pourquoi, dans un premier temps, j’ai décidé de partir de la région parisienne en 1994, croisant les troupeaux de moutons contraints ou heureux d’aller chercher une part du gateau à la ville. J’ai décidé de mon plein gré, de me priver des joies et des commodités citadines, et d’aller respirer l’air d’un endroit me semblant plus en harmonie avec l’idée que je me fais d’une qualité minimum de la vie d’un être humain en France. Entre les « neuf-cinq » (Gonesse, mon enfance), Paris XXIème (métro Goncourt, mes études), « neuf-trois » (Aulnay, mes 25/30 ans) et le « huit-un » (Tarn, région de Gaillac, à Puycelsi, l’un des plus beaux villages de France, zone protégée de la forêt de la Grésigne), il y a un monde, que dis-je, un univers de différence ! De la fourmilière nauséabonde aux grands espaces valonnés du terroir gaillacois, un choc entre la bête et la belle, le vacarme et la sérénité, le béton et les vignes, la prison et la liberté, l’étouffement et le bol d’air, le laid et le beau, le froid et le chaud, l’humidité fraîche et la douce torpeur, le gris et le vert …
D’abord, le milieu naturel de vie – ensuite, le calme, les bons produits de la terre régionale, l’absence de feux tricolores, ronds points, bouchons, parkings et parcmètres, radars automatiques et flics en planque : de quoi vivre détendu – et enfin, l’espace à vivre est immense et non bétonné : quand j’ouvre la porte de ma petite maison en location (je ne suis propriétaire de rien sauf de mon libre-arbitre et de ma liberté de penser), je ne vois que des arbres, des champs, des oiseaux, et parfois même des biches ; je n’entends que les chants (des oiseaux) et le bruit des feuilles secouées par le vent léger, parfois le moteur d’un tracteur ou d’un avion passant à haute altitude ; je ne sens que l’odeur des végétaux, variant selon les saisons et le temps qu’il fait. Quel est donc le rapport entre le bonheur et le niveau de ses revenus ? A mon sens, aucun ! Je suis plus heureux aujourd’hui alors qu’en ville, il y a 25 ans, je gagnais l’équivalent de deux à trois fois mon revenu net actuel, sans compter la voiture payée par mes employeurs successifs et les droits supplémentaires concédés aux salariés versus ceux d’un indépendant (l’indépendant, c’est « marche ou crève ! »). J’affirme donc, par expérience, qu’un smicard de la campagne peut vivre beaucoup « mieux » qu’un cadre de la grande ville, c’est à dire beaucoup plus près du bonheur !
Vue d’en haut du village : « Où est le béton ? »
Vue de la porte de la maisonnette NT : « Où sont les voisins ? »
Le village vu d’en bas : « Où sont les immeubles ? »
Prochain RDV demain avant l’ouverture pour de nouvelles aventures boursières.